Le métier de plongeur scientifique
La recherche, ça passe souvent par des prélèvements : en géologie, on creuse pour comprendre de quoi sont faites les roches, en archéologie, on analyse des objets pour en déterminer l'utilité, en biologie on prélève pour étudier le comportement des écosystèmes.
Mais lorsque l'on veut étudier ce qui se trouve dans l'eau et dans des profondeurs inaccessibles pour une majorité d'entre nous, on fait appel à des plongeurs scientifiques !
Lumière sur ce métier passionnant avec Sébastien Motreuil, plongeur scientifique au laboratoire Biogéosciences.
Lumière sur le métier de plongeur scientifique
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Pouvez-vous nous parler de votre métier et de votre parcours ?
Sébastien Motreuil : Je suis ingénieur d'études au CNRS depuis plusieurs années et je travaille dans le laboratoire Biogéosciences (CNRS/Université de Bourgogne) à Dijon. Ce laboratoire, qui compte environ 160 personnes, couvre divers domaines de recherche nécessitant un soutien technique lié à la plongée. Je suis également responsable du service de plongée scientifique au sein de ce laboratoire.
Quelles sont les différences entre un plongeur de loisir et un plongeur scientifique ?
Sébastien Motreuil : La principale différence réside dans l'objectif de la plongée. Un plongeur de loisir plonge pour le plaisir, sans obligation professionnelle, il peut faire de la photographie, de la vidéo ou simplement se balader. En revanche, le plongeur scientifique plonge dans un but professionnel, il est rémunéré pour ses missions et doit posséder des qualifications spécifiques. ces deux activités sont liées car il est d'abord nécessaire de passer par les niveaux de plongée loisir pour acquérir les compétences techniques et la sécurité nécessaires, avant d'aborder la plongée scientifique.
Quels sont les sites sur lesquels vous intervenez et comment sont-ils choisis ?
Sébastien Motreuil : En tant qu'ingénieur au CNRS, je suis en appui technique pour des chercheurs ayant des projets de recherche à travers le monde. Nous avons travaillé dans des lieux aussi variés que les Caraïbes pour étudier la biodiversité, l'Amérique centrale pour observer le comportement de certains poissons, ou encore les îles Kerguelen pour étudier la faune et la flore locales. Les destinations dépendent des besoins des chercheurs et de leurs projets de recherche.
Quelles disciplines nécessitent vos compétences de plongeur ?
Sébastien Motreuil : Nous travaillons avec de nombreux domaines : archéologie, biologie, géologie, et plus encore. Par exemple, pour l'archéologie subaquatique, nous aidons à cartographier des sites et à relever des artefacts. En biologie, nous étudions la faune et la flore sous-marine, et nous posons des capteurs pour surveiller les changements environnementaux. Nous travaillons également avec des sédimentologues pour prélever des carottes de sédiments dans les lacs.
Pouvez-vous nous donner un exemple de mission archéologique ?
Sébastien Motreuil : Nous avons collaboré avec le laboratoire ArTeHiS (CNRS/INRAP/Ministère de la Culture/Université de Bourgogne) sur le lac de Chalain dans le Jura, où il y avait des maisons sur pilotis datant de plusieurs milliers d'années. Nous avons aidé à cartographier cette zone, même si les structures étaient en grande partie dégradées par le temps. C'était une mission fascinante.
À quelle fréquence plongez-vous et jusqu'à quelle profondeur ?
Sébastien Motreuil : Un plongeur scientifique peut plonger jusqu'à deux fois par jour, cinq jours par semaine, mais cela dépend des besoins des missions. Les profondeurs varient selon les qualifications : un plongeur classé 0B peut plonger jusqu'à 12 m, un 1B jusqu'à 30 m et un 2B jusqu'à 50 m. Personnellement, je suis classé 2B, donc je peux plonger jusqu'à 50 m. La durée des plongées dépend des conditions et des tâches à effectuer.
Quels outils utilisez-vous sous l'eau et comment les adaptez-vous ?
Sébastien Motreuil : Les outils utilisés sous l'eau doivent être adaptés à l'apesanteur. Par exemple, pour percer un trou, nous devons nous ancrer ou être assistés par un autre plongeur pour éviter de reculer. Les outils doivent être étanches et souvent modifiés ou même fabriqués sur mesure pour répondre aux besoins spécifiques des missions. Nous utilisons aussi des parachutes de relevage pour remonter des charges lourdes à la surface.
Vous êtes également responsable de la formation des futurs plongeurs scientifiques. Pouvez-vous nous en parler ?
Sébastien Motreuil : Effectivement, transmettre ma passion est une partie importante de mon travail. À Dijon, nous avons mis en place une formation en plongée scientifique en collaboration avec l'Université de Bourgogne, le SUAPS, l'UCPA et d'autres partenaires. Cette formation, qui a débuté il y a un an, a permis de qualifier une dizaine d'étudiants cette année.
Pouvez-vous nous raconter votre parcours ?
Sébastien Motreuil : Depuis tout jeune, j'étais fasciné par les émissions de Jacques Cousteau, ce qui a nourri ma passion pour la plongée. Après avoir obtenu des qualifications en plongée loisir, j'ai poursuivi une formation pour devenir plongeur scientifique et ai intégré le CNRS, où je combine ma passion et mon métier au quotidien.